Soif de reconnaissance
C'est à Eric BERNE, le père de l'Analyse Transactionnelle, que l'on doit le concept de Signes de Reconnaissance (strokes en anglais).
Selon BERNE, la personne humaine a besoin pour vivre et se développer que ses pairs lui témoignent de l'attention, au travers de "signes". BERNE fait référence aux travaux de SPITZ, qui avait observé que les nourrissons hospitalisés se laissaient mourir s'il ne faisaient pas l'objet de l'attention du personnel soignant. Les gestes médicaux dénués d'affect n'étaient pas suffisants pour que les nourrissons survivent. SPITZ a appelé ce phénomène l'hospitalisme, et il a ensuite été observé dans de nombreux autres contextes.
D'après Eric BERNE, en grandissant, l'adulte continue d'avoir besoin de ces signes chargés d'affects, mais sous une forme plus élaborée, ce ne sont plus les caresses de la maman ou de tout autre adulte aimant, mais des signes, verbaux ou non verbaux, échangés entre êtres humains : le sourire de ma voisine, le hochement de tête du facteur, le bonjour du buraliste ... Berne affirme que le besoin de "strokes" est vital pour l'individu. Sans signe de reconnaissance "la moëlle épinière se flêtrit", écrit-il. Plus la relation est intense, intime, plus il s'y échange de signes de reconnaissance, et plus ce sont des signes de reconnaissance de grande qualité, c'est-à-dire qui sont propres à "nourrir" la personne relationnellement, et à lui permettre de se développer, de s'épanouir.
Que se passe-t-il en cas de pénurie de signes de reconnaissance ? En cas de solitude, d'isolement ? Berne explique que la personne privée de signes de reconnaissances positifs (agréables) va chercher des signes de reconnaissance négatifs (désagréables), car "tout vaut mieux que l'absence de reconnaissance". L'absence de signes de reconnaissance est si cruelle qu'elle pousse à préférer les coups à l'indifférence.
J'y réfléchis souvent lorsque je suis arrêtée à un feu dans ma voiture et qu'une personne se dirige vers moi avec un gobelet de carton. Je n'ai peut-être pas envie de donner une pièce. Mais un regard, un mot, un sourire, plutôt que l'indifférence, c'est fondamental.